Cécile, la régis au féminin !
Sketch du matin : cécile arrive au bureau
Cécile : « bonjour tout le monde »
Les collégues : « bonjour ma chérie » (commentaires : dans la pub, les boites de m… avec tous les faux-culs, on s’appelle « ma chérie » entre filles pour faire in)
Le boss : « bonjour cécile » (commentaires : technique de management : faire proche et tendance affectif mais en fait on s’en tape le coquillard)
La rivale : « ça va cécile ce matin (sous-entendu : tu ne t’es pas cassée la gueule, salope …)
Cécile un peu naïve : « qui veut un café ? »
La concurrente baisse la tête faisant mine de n’avoir rien-entendu.
Le boss a autre chose à foutre que boire du café et pense que cécile est quand même payée à autre chose. Faudra qu’il fasse une note de services sur ces pertes de temps.
Les autres pensent que c’est gratos et y vont.
Au café :
Cécile d’un ton enjoué et un peu naïf : « vous avez passés une bonne soirée » (filles et garcons)
80% font « boff », car c’est français de râler même si on ne sait pas pourquoi !
Les autres 20% :
« ouais ouais » style distinguée du 93 (prononcez neuf – trois – car à paris, on se le pète mais on n’a pas plus que 3 neurones en moyenne)
« Et toi » pour celles qui ne se rappellent plus ce qu’est une soirée.
Les autres ne parlent pas car elles touillent le café et elles ne peuvent pas faire 2 choses à la fois, elles sont des filles, pas des machines …
Le seul garçon a les doigts dans la bouche après s’être remis les machins en place. La moitié des filles font mine de n’être pas dégoutées
Cécile de retour dans son bureau hyper tôt pour ses horaires de DR, chef des RA, vers 10h12 et 43 secondes ouvre son laptop (à paris c’est laptop, pas ordinateur, histoire de …) et regarde ses mails et là premier mot grossier : « quel con lui avec ses mails, qu’est ce qu’il va me sortir ce matin … »
Cécile commente à voix basse ses mails du matin :
Mail du boss « zut zut, faut que j’y pense »
Mail de soeurette /bretagne« elle est mimi theifaine d’avoir pensée à moi. Moi aussi moi aussi, je t’embrasse »
Mail d’une RA n°1« elle, elle est vraiment nunuche, elle comprend rien ! »
Mail de soeurette/lac léman :« elle est sympa de me filer des nouvelles d’aimée. Ouf ça va. Oui oui j’y pense pour ce week-end »
Mail d’une RA n°2 « oui ok je vais aller la voir, faut que je la recadre »
Mail de patrick : ……« quel sensible ce patrick, je ne sais pas s’il ne se fait pas un film … mais il est vraiment touchant »
Mail d’une RA n°3 « oui oui pas mal son idée. »
Mail de cédric :« mais il n’a pas autre chose à faire que me taquiner , je ne sais pas si un jour il ne va pas finir par me tirer les oreilles pour de vrai , heureusement que marine m’a dit qu’il était globalement sympa !»
Mail d’une RA n°4: « elle est bien la nouvelle, normale c’est moi qui l’es embauché. On est en symbiose »
Cécile part à douvaine : la préparation de la valise …
Bon bon, vendredi, j’arrive là-bas, faut que marine me voit resplendissante. Je vais me la jouer « working-girl » juste ce qu’il faut mais pas « fashion victim », juste du classe sans de la frime. Faut qu’il sente que je suis à la page … Elégante mais pas pomponné sans être négligée … voila voila, nickel.
C’est réglé déjà pour vendredi Samedi, bon ….
Aimée vient, alors je vais m’habiller entre deux. Un style artiste épanoui avec une écharpe, un sarwell made in china, des chaussures indiennes, une longue chemise en soie en bio naturelle. Je prendrais l’air stone, elles vont me trouver super en forme.
Je suis super contente de les revoir.
C’est un peu con qu’elles soient avec leurs maris, mais bon c’est difficile de les laisser à la porte d’entrée ou à la niche. Surtout que l’un fait la cuisine, faut qu’on les garde …
Dimanche, y a ses 2 potes, dont le jurassien, faut que je sois dans le tempo.Bon le jurassien, il a un style décontract, je l’ai vu, mais l’autre grognard, il doit être habillé plus proche du paysan que du style « 5eme avenue »….
Hi hi hi Mon petit gilet en vrai-faux cuir artificiel du larzac pour faire fille chic. Je l’avais acheté dans le cadre des ateliers poteries pour cadres stressés que acodamia m’avait offert pour bonne rentabilité sur l’année écoulée, concours interne intra-régions sur la rentabilité par tête de client, moyenne pondérée toutes matières confondues.
J’étais arrivée première devant la région auvergne je crois.
L’auvergne, je ne sais même plus où c’est exactement, qu’est ce qu’ils peuvent enseigner là-bas : la fabrication des pneus, des fromages ?
bon, je ne sais plus ..
Je vais enfiler un jean, ça fait campagne, provincial. La fille cool quoi … je prends mon jean « troué » d’avance ou mon jean trop neuf. Il neige dimanche pas bon, si j’ai des aérations, je vais attraper la malaria.Bon allons sur mon jean neuf. Je vais lui marcher dessus, il sera fripé. Ça fera la nana négligé. Impec !Bon bon, bon …
Des bottes, non, m’ont me dire que je ne suis pas en bretagne …
Des escarpins, non je vais m’enfoncer dans leur truc vert devant leur maison, comment ça s’appelle, zut, zut … ah oui, je suis bête, de l’herbe ! De l‘herbe en hiver, ça existe, je ne sais plus, bon enfin pas grave, on dira qu’il y en a.Ah, mais oui, mes chaussures de l’armée américaine du surstock américain de sarcelles. Attends, ils vont me prendre pour une fille de là-bas…. Ça va les épater !
Et puis mon petit dico que je lirais dans le train pour être dans le bain : le « fameux-parler montagnard moderne » edition « jemecroislenombrildumonde » –parisOups, j’ai oublié, je vais amener un bonnet, des gants et une écharpe en laine pour la nuit.
Les pays de loups, faut s’en méfier …Hop, 2 valises pour le week-end, 35kg en tout, c’est bien, faut bien ça. J’espère que je ne vais rien manquer
Finalement je me demande si c’est une bonne idée d’aller là-bas, s’il m’arrivait un truc !
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On s’est couché tard, c’était tellement bon de se retrouver, tout le monde m’a sauté au cou, sauf cricri avec son devoir de réserves…
En arrivant auparavant à leur gare de campagne, le temps était mitigé, je pensais que c’était comme les cartes postales en terme de temps.
Ben non, zut, on nous aurait menti ? Avec soeurette, on est rentré directement chez elle. Tiens ils ont des bouchons en province ! ils ne doivent plus se sentir de faire comme nous … le mimétisme c’est important pour les petites gens de derrière le périph.Je me suis mis de la terre sur mes escarpins, c’est bucolique leur village, mais ça va un moment, ils auraient pu bétonner comme tout le monde.
Mettre 3 ou 4 arbres, des vrais je parle, mais avec une grille en fer pour protéger les pieds des passants.
Bon, pas en plastique les arbres, mais avec les progrés du plastique, à réfléchir quand même !
Je me suis fait réveiller par le bruit du vent dans les arbres, un truc insupportable, je crois que le bruit des klaxons me manque déjà.
Ce silence m’angoisse, en ouvrant la fenêtre, il n’y avait pas la même odeur délicieuse de la maison : cette fumée mélangeant la pollution, l’air frais des usines, la gueule du voisin en face … J’ai cru que mes poumons allaient éclater.
J’ai relevé la tête, il y avait un âne qui me regardait dans les yeux. Je vous dis un âne mais je n’étais pas sûr, peut-être un petit cheval. Un truc comme ça … c’est quand même étrange qu’ici il ne mette pas un mur bétonné comme d’habitude, vraiment indécent.
Il avait un regard bizarre, je demanderai à soeurette qu’est ce qu’il me veut. Non je ne dirais rien, j’ai peur qu’on se moque de moi.
Quand même bizarre. Ici rien ne tourne comme à la maison.
Allons allons, aujourd’hui aimée, chouette, chouette
Hou mais que vois-je, corentin : tu vas bien mon grand ????
…..
Quel bon week-end je me martelais dans ma tête mais je souris timidement en voyant arriver la gare de lyon : paris me manquait un peu et j’incline la tête à la recherche d’une nostalgie de ce manque.
Le plein de petits moments différents, revoir aimé qui va mieux, marine et sa famille et le petit frère qui fait plaisir à revoir, un tempo en 3 phases. Faire le plein d’énergie et replonger dans mon bain quotidien si prenant, si moi …
Un dimanche fait de rencontres de l’entourage de marine : les enfants qui courent, cricri qui m’évite et ses amis un peu envahissant : patrick qui est gentil, campagnard, attentionnée et finalement collant en réalité et assez touchant par mail.
Je ne sais pas s’il a l’eau courante, je n’ose pas lui demander. Probablement que oui … pas sûr !
Son histoire de fond de vallée est-elle vraie ? Je n’ai as osé lui demander de peur de se faire passer pour quelqu’un qui ne sait pas, car c’est bien connu nous les parisiens, on sait tout sur tout. Et puis bien mieux que les autres. Un truc inné qui s’ingurgite dans notre quotidien … grace à une ambiance, une possibilité de connaissance dont chaque habitant profite. Pleinement …
C’est tellement évident !
Eux là-bas, ils ne savent pas ce qu’est notre vie faite de vitesse, d’extase, d’impression de dominer le monde, le diriger, en sorte de le faire tourner simplement … mais comment tournait-il avant que paris soit paris. A se demander !
J’ai aimé poser mon pied à nouveau sur le quai, je retrouvais en un instant mes ardeurs et mes envies, j’étais vivante et je repartais. Mes pieds étaient encore un peu immaculés de boue de la campagne, ces traces du week-end qui faisaient si authentiques, si parisienne en week-end ailleurs.
J’avais vécu l’expérience de la province profonde, de ces plaines et vallées où résonnent légendes et cris du loup.
De ses amis, il y avait aussi le montagnard, une espèce de grande bête à la fois sauvage et arrogant, avec son épouse asiatique qu’il avait du acheter dans un catalogue par correspondance. Le choix fût bon, elle avait l’air gentille. 3 mômes insignifiants comme tous les chieurs, à gesticuler, nous pourrir le repas et nous obliger à s’aérer quand on peut tranquillement se vautrer toute la journée dans le canapé, parler de la pluie et du beau temps à paris et laisser couler le temps.
Je tournais la page, j’étais en retard sur mes collages, mes lessives, j’avais raté l’épisode à la TV de samedi soir que je n’avais pas demandé de regarder.
En arrivant je me suis collé devant la TV avec un plateau repas, sorti un plat surgelé fait à partir de déchets de poissons mastiqués 3 fois par des asticots d’écosse et vomi ensuite. 38 secondes aux micro-ondes.
Le bonheur si je veux !
Faites qu’il n’y est pas de prochaine fois dans ce monde barbares, je n’oserais pas le revivre en fait.
***
Je suis parti agacée hier soir : qui il est lui pour critiquer notre intelligence collective hor-pair. Devrait se payer une TV et apprendre à écouter …
Son bac -12 « province profonde » et son métier à la con ne lui donne pas de légitimité pour effleurer la puissance de notre réflexion et notre positionnement astucieux et culpabilisateur.
Ce week-end a en fait tout cassé : à distance, je les trouvais sympa les 2 copains, maintenant ils mes saoulent dans des registres différents, mais me saoulent vraiment, limite me gavent comme ils doivent dire dans le sud-ouest de la France, au sud de Paris…
Ni drôle, ni sympa : faut que je me la joue débordée comme je ne le suis pas ces jours, que je mette de la distance pour m’effacer.
Faut en interne qu’on réfléchisse au positionnement de notre développement de notre concept si innovant pour l’aide des étudiants en difficulté, dont leur avenir se joue entre mes mains, du moins surtout dans mon cerveau ! Uniquement et puis je le pense en toute simplicité …
Finalement je me verrais bien ministre de l’éducation : croire en mon potentiel !
Voila...
Ça me rappelle quelque chose ce slogan, oui, bon je ne sais plus… Faut que je pense à passer plus de temps devant ma TV. Ça rend intelligent, parait-il.
Oui finalement ça fait un peu machine ce mot, limite productivité, kanban….
Moi je suis tout autre qu’une machine : une artiste confirmée avec des expositions, certes en province, mais quand même. Suis également un manager hors-pair, ministrable …
A réfléchir, le couillon a peut-être raison sur le mot potentiel… oui, bon, le dircom maintenant !
Attends attends ma fille : ça ne va pas, qu’est ce que tu racontes !!!!!! On ne va pas lui donner raison …
De toute façon, j’ai raison !
***
L’hiver se faisait long, le travail ennuyeux et c’est dans un état mélangeant lassitude et fatigue que je décidais de partir sur un coup de tête dans ma Bretagne qui me manquait tant, et je fus toute surprise de me retrouver sur l’autoroute, ma valise faite à la va vite. C’est à ce moment là que je croisais mon regard dans le rétroviseur et c’est la première fois que je me voyais un sourire.
Un petit sourire triste mais rempli d’espoir de jours à part, à venir.
J’ai encore souri de m’avoir vu sourire, l’autoroute a défilé et en passant Nantes, la remontée sentait l’écurie, les couleurs me devenaient familières, même si la mer se faisait désirer pendant un long moment.
Tous les panneaux indiquant les villes de mon enfance raisonnaient en même temps qu’ils apparaissaient : vannes, Belle-île, Larmor-plage, Quimperlé …
Ste marine est arrivé assez vite, mon désir d’y retourner m’avait fait faire des excès de vitesse que je ne pus contrôler. J’ai vite posé mon balluchon dans la maison, enfilé ma tenue avec ma parka, des bottes en cuir, un pantalon de toile et 2 pulls en laine qui me suivaient toujours dans mes périples, ici.
Le temps était celui des printemps de mon enfance avec vents, éclaircies et bruines. Mon cœur venait de se remettre à battre, je le sentais.
C’était le son de la chamade, de l’amour, un peu aussi celui de la folie.
J’affrontais tous les derniers évènements et allais à la pointe de Sainte marine en ayant suivi le fronton de l’estuaire et en jetant des coups d’oeil à Benodet, la voisine. Il n’y avait pas âme qui vive dans ce jour à part.
La bruine battait mon visage, le vent me caressait les cheveux, le soleil m’éblouissait lorsqu’il apparaissait.
J’écartais les bras en croix, le plus loin possible de mon corps, je rejetais ma tête en arrière : J’étais vivante, je ne faisais qu’un avec les éléments, j’étais de retour chez moi, tout m’avait manqué.
J’ai senti le sel sur mes lèvres, c’était celui de la mer mélangée à mes larmes. Je suis restée – il me semblait une éternité et aux premières lueurs de la nuit, je suis rentrée tel un marin qui retourne sur la terre ferme, avec le devoir accompli.
Le soir je me suis glissé dans le lit que je m’étais fait à « l’ancienne » : avec des draps et des vraies couvertures, comme bonne –maman nous le faisait et venait ensuite lorsque nous nous couchions nous embrasser sur le museau en prenant soin de bien savoir si on était bordé. Dans ce lit avec mes souvenirs d’enfance, on sentait ce soir l’humidité de la mer, j’ai plongé dedans, je n’ai pas eu le temps d’aimer ce moment, je m’étais effondrée d’un bonheur simple et depuis un moment recherché.
***
Un rayon de soleil m’a ébloui l’œil et m’a obligé de me détourner, j’ai cherché encore le bout de mon lit et ai déplacé ma tête. A cet endroit, l’oreiller était frais comme la rosée, l’humidité m’a rappelé que j’étais encore à Sainte-Marine. L’instant était délicieux, j’ai paressé encore un long moment, puis ai fixé le plafond. Il était comme celui de mes vacances d’enfant, tous les aspects de la pièce n’avaient pas changés. J’aimais ça, j’aimais ce lieu, il était moi, dans mon cœur, dans mes envies, dans mes entrailles….
Un week-end seule, solitude parfois triste, je m’en répétais les avantages pour m’en persuader … je n’avais pas les armes pour m’en dissuader, un jour peut-être … peut-être que je le redoutais !
J’ai vite chassé mes idées noires, puis me suis levée pour parcourir 2 fois la pièce dans son contour dans cette semi-pénombre. J’ai repris ma respiration avant d’ouvrir la fenêtre puis le volet comme pour être prête. La fenêtre a émis un miaulement de rouille, le volet un son de bois gorgé. Le spectacle était à la hauteur de mes attentes, j’ai reculé comme pour mieux réceptionner les ondes : l’estuaire était sous mes yeux, je me suis mise sur la pointe des pieds et en passant à travers les feuillages, j’ai vite vu les bateaux qui faisaient lentement le tout de leurs anneaux d’ancrage.
L’air était vif, des petits moutons formaient la mer et lui donnaient un aspect non lisse attirant. J’étais illuminée, j’ai fermée les yeux et en me détournant dans la pièce j’en suis restée aveugle un aspect. J’ai cru un instant que j’allais m’évanouir. J’ai posé ma main sur la petite table en bois blanc vieilli par le temps du milieu pour reprendre mes forces.
J’ai enfilé mon gros pull de laine blanc puis suis descendue me faire un thé. L’endroit était silencieux et respirant. Le bruit de ma cuillère qui cogne les bords de mon bol en tournant a émis un tintement aigue et agréable à entendre, comme le la des diapasons. Je l’ai répété comme une enfant plusieurs fois puis je me suis arrêtée.
J’ai sauté dans ma douche, me suis habillée en 4eme vitesse et après avoir enfilée mes bottes en cuir, j’étais prête pour franchir la porte pour aller m’imbiber de l’extérieur. En ce jour, tout était déjà merveilleux.
***
Telle une somnambule, j’ai pris la direction du petit port par la côte et au détour d’une possibilité, j’ai grimpé sur les rochers jusqu’à rejoindre l’eau dont la marée était ascendante.
J’ai posé mes 2 mains à plat contre la surface de la mer, je les ai appuyé très fort, j’ai ressenti une merveilleuse résistance de l’eau. J’y mettais le poids de mon corps, le poids de mes souvenirs d’enfant, de cette petite fille qui rentrait ensuite toute couverte de sable à la maison et qui se faisait gronder gentiment par bonne-maman. Ma bonne-maman au regard amoureux pour nous, ma bonne-maman qui nous suivait à distance pendant l’année, loin d’elle, et qui voyait grandir lorsque nous étions avec elle.
Elle avait ce regard malicieux, un visage doux et ridé.
Un visage façonné par la mer et qui parfois en prenait les contrariétés.
En ce jour, c’est le visage de bonne-maman que je vois en reflet dans l’eau qui me fait face, je suis venu à la recherche de mes souvenirs, de son souvenir aussi, des moments passés et qu’aujourd’hui je regrette de n’avoir pas pu apprécier à sa juste valeur.
C’est en grandissant qu’on mesure leurs qualités d’évènements passés.
Je me suis déchaussée, j’avais ce besoin de m’imprégner, de faire communion avec une journée à part et malgré un temps de fin d’hiver.
Le froid m’a irradié les pieds puis la sensation est remontée. Je ne les sentais plus et pourtant la sensation était celle d’être dans mon élément : un liquide maternelle en somme, du moins telle que je le perçois.
J’ai rejeté mes cheveux à l’arrière, serré les lèvres et ai combattu cette paralysie : un sorte de combat intérieur, un jeu enfantin mille fois répété que j’avais oublié depuis maintes années et qui ressurgissait dans ce périple.
L’eau montante, j’ai battu pavillon arrière et avec mes bottes à la main, à la va-vite, j’ai trouvé un autre îlot pour rechausser et repartir. J’étais engourdi et heureuse : j’avais partagé ce moment avec cette petite fille que j’étais il y a quelques années.
Le chemin retour résonnait des mêmes rires de mes étés d’enfant.